Péril des poissons dans le Baoulé, au Mali

Avec le dérèglement climatique dans les pays du Sahel on assiste de plus en plus aux extrêmes concernant les indicateurs environnementaux (température, pluies, vent…). Ce fut le cas en avril 2019 dans le sud-ouest du Mali dans la commune de Garalo, Cercle de Bougouni.

Une grande pluie s’est abattue sur la commune de Garalo le 21 avril 2019. Selon les autorités locales, il a été recueilli entre 115 et 120 millimètres d’eau de pluie en trois heures. Suite à cela, le fleuve Baoulé (un affluent du fleuve Niger) a débordé.

Selon les responsables de l’Association des pêcheurs de la localité, cette eau a drainé des excréments de bœufs, des feuilles mortes, de la cendre des bois brûlés dans la forêt. Toutes choses qui ont exterminé une quantité importante de poissons du fleuve.

il y a eu entre 115 et 120 millimètres d’eau de pluie

Cette version des faits a été confirmée par le Maire de la commune de Garalo, Issoufou Kanté : « Selon les agents des Eaux et Forêts, il y a eu entre 115 et 120 millimètres d’eau de pluie. Suite à cela, le fleuve Baoulé est sortie de son lit », a-t-il expliqué. « Cette eau qui est descendue dans le Baoulé était composée des excréments de bœufs qui sont en pâturage dans cette forêt, de la cendre des bois brûlés, des écorces et feuilles d’arbres », a-t-il poursuivi.

Selon les pêcheurs, c’est ce mélange avec la forte quantité d’eau dans un laps de temps qui a été fatale pour une quantité importante de poissons de la rivière. « Ce qui nous a confortés dans cette analyse est le fait que tous les types de poissons ont été concernés par cette catastrophe mis à part la silure », a dit le maire de la commune. Selon lui, cela prouve que ce n’est ni du poison, ni de l’eau polluée qui ont été déversés dans la rivière.

Les populations vers la rivière pour ramasser les poissons morts

Ce phénomène a drainé une foule importante de personnes vers cette partie de la rivière. Elles sont parties ramasser les poissons morts. Ce qui a d’ailleurs causé la mort d’un villageois par noyade, a regretté M. Kanté.

Ces informations ont été confirmées par le Président des pêcheurs de la commune de Garalo. Selon Drissa Traoré, c’est un phénomène qui se produit chaque année avec l’arrivée des premières pluies. Cependant, l’ampleur n’a jamais été aussi grande. « Avec la quantité de poissons morts, nous avons peur qu’il n’y ait un manque de poissons dans les jours à venir », s’est-il exclamé.

« Les gens venaient de partout pour ramasser les poissons morts sur les berges pour lez. On pouvait remplir un sac de 100 kilogrammes de poissons en 30 minutes. Et la grande partie de ces poissons a été amenée à Bamako », a-t-il ajouté.

Les spécialistes des Eaux et Forêts ont également avancé les mêmes raisons. Selon Sekou Kanta, ingénieur des eaux et forêts, il n’y a rien d’inquiétant. « C’est quelque chose qui se passe de plus en plus tout le long du Baoulé et ce n’est aucunement de l’empoisonnement », explique cet ingénieur qui a d’ailleurs fait sa thèse sur ce phénomène.

La partie de la rivière Baoulé concernée par ce phénomène se trouve dans le complexe des aires protégés de Bougouni-Yanfolila, dans la zone d’intervention du MFC. C’est ce qui a motivé le MFC à enquêter sur la situation afin de clarifier aux différents acteurs les raisons du péril de poissons.

Bien qu’il soit soulageant de savoir que le péril n’est pas dû à un empoisonnement ou à une autre catastrophe environnementale, il est toujours inquiétant que ce phénomène pourrait se reproduire chaque année, et même à plus grande échelle, à mesure que les changements climatiques bouleversent les cycles météorologiques vers l’extrême.

Point de Vue de MFC Nyetaa sur ce phénomène

Vous avez été nombreux à réagir à ce sujet. Nous vous en remercions. Après le phénomène de morts massives de poissons, l’empoisonnement dû à l’extraction de l’or ou à d’autres facteurs externes était notre première hypothèse. Toutefois, les échanges avec les populations et les experts nous ont amené à accepter une autre hypothèse. Car ce n’est pas la première fois que ce genre de phénomène se produit dans le fleuve Baoule. Il y a eu d’autres cas depuis les années 1980.

Cependant, la raison pour laquelle nous avons mentionné le dérèglement climatique ici est qu’en raison des changements climatiques, il existe davantage de phénomènes extrêmes qui peuvent provoquer des situations extrêmes. Celles-ci, à leur tour, peuvent avoir des impacts indirects auxquels nous ne pensons pas. En raison de la diminution des précipitations annuelles, et de l’augmentation de l’évaporation due à la température, les marigots s’assèchent et les rivières ont moins d’eau.

L’assèchement lent des rivières permet aux poissons de s’adapter au changement de leur écosystème. Par contre lorsque le courant et la quantité d’eau contenant beaucoup de substances différentes change brusquement, cela joue sur la qualité de l’eau (habitat) et la quantité d’oxygène diminue soudainement. Cela peut causer des morts massives de poissons.